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20 janvier 2012 5 20 /01 /janvier /2012 13:45

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C'est peu dire que les derniers Fincher étaient décevants. Machines hollywoodienne millimétrées mais sans relief, elles laissaient dubitatif quant à la présence ou non du bonhomme derrière la caméra. Ce qui est encore plus incompréhensible que le grand écart entre le Fincher subversif et celui qui s’effaçait derrière des œuvres totalement impersonnelle, c'est que ce changement radical de style, au lieu de questionner le spectateur sur l'avenir d'un cinéma tendant inexorablement vers l'uniformité, a convaincu ce dernier que ces films totalement insipides étaient la marque de fabrique d'un grand réalisateur. Y a-t-il besoin de souligner encore le contresens général ou apparaît il de lui même ?


Millenium, et c'est déjà une qualité en soi, ne se range pas si facilement qu'on le voudrait dans une case ou dans l'autre. Si l'on peut d'abord croire à un univers gothique quand on appréhende le film seulement par sa magnifique affiche, on comprend dès le générique que le film sera habillé et habité d'une tout autre ambiance. Le travail sur la couleur noire a ceci de remarquable qu'il suffit presque à lui seul à résumer le film, son côté métallique, froid correspondant parfaitement à la dimension rationnelle et livide du métrage. Loin des considérations affectueuses et sentimentales, toutes vouées à l'échec, Millenium dépeint la froideur du monde moderne dans une Suède loin de la chaleureuse social-démocratie et des krisprolls croustillant. Ce qui constituait la faiblesse des récentes réalisations de Fincher, le côté impersonnel et sans âme de The Social Network au premier rang, se traduit ici comme l'argument majeur de ce thriller moderne qui fait de l'inhumanité l'origine et les conséquences des situations macabres qui s'enchainent.


S'il tient admirablement le rythme sur plus de deux heures, il faudra faire abstraction des vingt dernières minutes qui, s'en être totalement bâclées, nous replongent dans l'intrigue liminaire qu'on avait fini par oublier et dont la conclusion hâtive prouve qu'elle est plus un poids pour le film qu'une réelle conclusion. Au final, on aurait tort de bouder Millenium, ne serait ce parce que Fincher montre qu'il a encore assez de talent pour glisser derrière une œuvre en apparence classique, quelques détours délicieusement manipulateurs.

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4 janvier 2012 3 04 /01 /janvier /2012 15:26

http://www.edogo.com/userfiles/image/community-tv-show-600x250.jpg

Dire que Community s'apprécie proportionnellement au degré de connaissance de la culture populaire américaine est partiellement faux. S'il est indéniable que le fonctionnement ultra-référentiel de la série demande au spectateur une connaissance minimale du paysage audiovisuel américain, il est en revanche très restrictif de définir Community comme son abécédaire.

Elle l'est, mais elle est beaucoup plus que ça. Community utilise le langage télévisuel pour mieux le retourner contre lui. C'est comme voir un film à travers son tournage mais où les acteurs seraient tout à la fois leur personnage et conscient d'être en train de le jouer puisque le tournage serait en fait le film (ça suit toujours au fond de la classe ?). Community met à nu tout le procédé audiovisuel (de la technique jusqu'au jeu d'acteur lui même), et utilise cette transparence comme un nouveau modèle d'intrigue, où Abed, véritable chef d'oeuvre de méta-personnage, serait le lien toujours visible, accessible entre la fiction qu'est la série et la réalité. S'érige par le biais d'Abed principalement mais pas que, une sorte de réalité parallèle matérialisant ce qu'on appelle communément : le recul. 

Community ne laisse pas le spectateur avoir du recul, elle le fait pour lui en l'interpellant directement. On est en pleine exploration d'une conception comique impressionnante d'ambition et d'autant plus excitante que jamais (ou du moins, jamais si bien) explorée.

Le plus fort est tout de même de ne pas se contenter d'un balayage culturel pourtant à lui seul déjà génial et colossal, mais bien de ne jamais perdre de vue que Community ne doit cesser d'être elle même une série qui parle des autres pour parler d'elle même tout autant qu'elle parle d'elle même pour parler des autres. Si vous n'êtes toujours pas convaincu, il y a toujours l'argument consistant à piquer la curiosité du lecteur en énonçant deux ou trois scènes, personnages ou épisodes géniaux et représentatifs de la série. Mais faire un choix entre Señor Chang le "professeur" d'espagnol chinois, un professeur de poterie traumatisé par le film Ghost (et sa fameuse scène du vase la poterie), une parodie de Mad Men incluant Alison Brie jouant aussi dans Mad Men, l'épisode du complot repoussant jusqu'à ses limites le concept dramaturgique de rebondissement, et environ une dizaine de milliers de millions d'autres idées comiques, au moins...


On pourrait bien y rester des heures, alors qu'il suffit de passer 20 minutes devant un écran et laisser Community le transpercer.

4.5étoiles

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29 décembre 2011 4 29 /12 /décembre /2011 12:06

 

2011 c'est fini, ou presque. J'ai vu 48 des films sortis cette année, et en loupé pas mal avec regrets. Pas si mauvaise année qu'on a bien voulu le dire tout au long, de bonnes surprises, des découvertes, mais c'est vrai, quelques déceptions.

Une crainte après cette année : on assiste de plus en plus à des "films" qui n'ont de cinémtographique que leur forme de long métrage, sans âme, dans le sens où on ne sent pas de réelle envie de faire du cinéma. Attention certains films joue de ça par concept, mais certains sont juste involontairement insipides. Il ne suffit pas de filmer pour faire un film, il ne suffit pas d'avoir quelque chose à dire pour que cela se transforme automatiquement en film. L'exemple de Kassovitz cette année est dramatique, puisque a priori pas dépourvu de talent, il nous sort l'anti-film par excellence où tout sonne faux, des dialogues à l'image fade, en passant par le jeu déplorable. Crainte redoublée après Contagion qui a beaucoup de similitudes formelles avec L'Ordre et la morale. 

Bien heureusement, il y a quand même eu quelques oeuvres de cinéastes, de vrais, confirmés ou débutants, qui en tentant de nouvelles choses, ou pas d'ailleurs (on peut exceller dans le classicisme ou même le déjà vu), ont démontré que le 7eme art avait encore du souffle. Cette année d'ailleurs, est la deuxième au classement en termes de fréquentations de salles, en France, après l'année 1966.

Sans surprise la première place revient à Aronofsky, à son oeuvre traumasqui de plus fût une véritable expérience vivante, d'autant plus dans une salle ultra-réceptive à ce qu'il lui était montré. Juste derrière, Nicolas Winding Refn consolide sa filmographie déjà colossale (pas en quantité mais en qualité), avec un exercice de style recyclant la série B, l'élevant à des sommets où l'on ne penser jamais la voir. Pour compléter le podium, une curiosité, un film qui n'en est pas un, un documenatire construit par le buzz, pour le buzz et sur le buzz, édifiant, pour le moins. Le classement fait la part belle à ceux qui ont tenté au risque de se casser les dents, ces derniers ne se trouvent d'ailleurs pas dans "Le Pire", catégorie privililégiant les petits malins ou les gros bourrins essayant de se faire passer pour novateurs.

 

Le meilleur

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1/ Black Swan, Darren Aronofsky : Enorme choc qui laisse à cran. En puissance et en grâce. Séance inoubliable parce que vivante comme jamais.

2/ Drive, Nicolas Winding Refn : Exercice de style des plus aboutis, directement culte. Le pire, c'est qu'on commence à avoir l'habitude avec NWR.

3/ I'm Still Here, Casey Affleck : OCNI ambitieux dont il faut comprendre les motivations pour passer outre l'aspect documentaire pas toujours agréable à l'oeil. Exceptionnel dans ses enjeux, dans sa construction, parce qu'il dépasse le cadre de film pour y intégrer sa création en tant que partie intégrante du film lui-même.

 


4/Another Earth, Mike Cahill : Meilleur film de science fiction de l'année, et peut être plus, justement parce qu'il se sert de la SF comme toile de fond pour soulever des questionnements bien réels. Pas de vaisseau spatial, de sabre laser à l'horyzon. 

5/ Super 8, J.J. Abrams : Super.

6/ Shame, Steve Mc Queen (II) : Elégant et distancé.

7/ Balada Triste, Alex de la Iglesia : Cauchemar filmé, cynique et irrévérencieux.

8/ The Green Hornet, Michel Gondry : Barré mais pas stupide, Gondry oeuvre à la démystification du héros, something à la mode ces temps ci.

9/ The Tree of Life, Terrence Mallick : Palme d'or pas volée, film dense dans ses thèmes et riche visuellement.

10/ Tintin, Steven Spielberg : L'hommage qu'il fallait, surprenant.

 

 

Le pire

L Ordre-et-la-Morale-Photo-Promo-01

1/ World Invasion : Batte or L.A. : Les E.T. on va dire que c'est les bougnouls soldats.

2/ L'ordre et la morale : La Haine 

3/ Contagion : Epidémie dans le cinéma.

4/ Melancholia : Mêlant colique.

5/ Philibert : Oss 117 au Moyen Âge, c'est pas sérieux, c'est pas marrant non plus. 

6/ Machete & Hobo with a Shotgun : C'est bon on a compris le concept de grindhouse, c'est possible de voir autre chose maintenant ?

7/ True Grit  : Les frères couenne. Dire que c'est les mêmes qui ont fait No Country, Barton Fink, Miller's crossing...

8/ Tron : Le Ratage : Les Tron cette année, c'était pas la joie. Georges me fait oui de la tête. 

9/ Caméras de surveillance du Sofitel : Pas mal, la scène de la danse est bien foutue, mais on nous cache l'essentiel, la baise (cf. Shame)

10/ Film du raid contre Oussama : Avant première un peu trop sélective, Mr et Mme Obama, H. Clinton, c'est ça la démocratie ?

 

 

Sérivore débutant

http://s.excessif.com/mmdia/i/25/1/breaking-bad-saison-3-4174251dcdad_1731.jpg?v=3

Cette année s'est aussi achevée la saison 4 de Breaking Badpoussant à l'extrême toutes ses initiatives, et ses limites, encore et toujours. La finesse narrative de l'ensemble, la régularité des 4 saisons a permis d'amener ce final d'un cynisme sans nom. Je ne sais pas quoi attendre de la saison 5, la confrontation avec Hank, peut être soit un sommet, soit une déception après celle qu'on vient de vivre dans les saisons 3 et 4. Dans les deux cas, Tuco Salamanca peut aller se rhabiller.

J'aime tellement cette série que j'hésite à publier quelque chose dessus, j'aurais peur d'être trop restrictif. De plus, un très beau travail en cours chez fredastair (cliquer pour aller voir, ça en vaut la peine) me dit de la fermer et de le laisser faire les pros.

 

A côté, je me suis attaqué plusieurs autres oeuvres du petit écran.

 

Mad Men, en pause après 2 premières saison remarquables dans leur qualité de reconstitution, physique, visible, mais aussi de l'esprit d'une Amérique en fin de cycle, dont toute l'Histoire e lit au travers de ses personnages passionants.

Games of Thrones,si je reconnais ses nombreuses qualités, j'attends que la saison 2 soit plus épique, et que les tribulations politico-stratégiques soient mieux amenés et misent en valeur. 

The Big Bang Theory, geek is the new funny, humour de répétition efficace car très bien dialogué. Howard Wolowitz est un modèle pour totu homme qui (ne) se respecte (pas).

Misfitssurfant sur la vague de la rationnalisation du concept de héros, drôle mais inégal, j'avoue avoir quelques craintes avant d'attaquer la saison 3 qui se fera sans Nathan, plaque tournante de la série.

Community, brillante, ultra-référentielle, un humour considéré comme élitiste, moi j'appelle ça plutôt de l'intelligence, de la suptilité, mais chacun sa vision. Je la conseille aux amateurs de Wes Anderson par exemple, ou aux amateurs d'humour à l'américaine, le vrai, l'authentique.

Skins (UK), première saison étonnante, pas du tout ceux à quoi je m'attendais, une sorte de Trainspotting nouvelle génération. Tout ne se vaut pas, épisodes un peu chiant, mais dernier épisode remarquable.

 

2012

http://marvelll.fr/wp-content/uploads/the-dark-knight-rises-trailer-banniere.jpg

Au programme,  bonnes résolutions et grosses attentes.

Mes bonnes résolutions seront :

- Avoir mon année, afin de pouvoir décoller pour la fac de ciné au Québec pour un crusus de 6 mois qui devrait être intéressant pour approfondir l'étude d'un art que je ne connais que comme amateur, loin des théories et autres aspects techniques.

- Finir un festival de Christoblog, car je comence à croire en une malédiction m'interdisant d'en boucler un !

 

 

Côté attentes,

Bien sûr la "conclusion épique" de la saga Batman vu par Nolan avec The Dark Knight Rises, puis pourquoi pas un retour en forme de Peter Jackson dont le voyage innatendu de Bilbo le Hobbit est plutôt prometteur, dans la lignée du Seigneurs des Anneaux. Ensuite qui pourrait dire non à un James Bond réalisé par Sam Mendes, avec Javier Bardem et Ralph Fiennes en grands méchants ? Pas moi, j'attends donc Skyfall, le James Bond, 23eme du nom. Un peu désespéré mais je me prends à rêver d'un retour du Tarantino que j'aime, du genre (western) au casting, il aura tout pour réussir dans Django Unchained. Malick habitué des longues pause, enchaîne cette fois ci, on verra bien ce que vaut The Burial. Après le très bon There will be blood, on peut attendre beaucoup du nouveau Paul thomas Anderson, The master. Enfin, même si le projet a pris du retard et que le film ne sera pas pour 2012, j'attends avec impatience le prochain Bong Joon-Ho, adapté d'une BD post-apocalytpique, Le Transperceneige.

 

En vous souhaitant d'agréables fêtes de fin d'année, un réveillon bien arrosé, méthode efficace pour ne pas subir le choc mental que constitue le changement d'année.

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15 décembre 2011 4 15 /12 /décembre /2011 12:32

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Jim Jarmush est marqué d'une sorte de spleen baudelairien à la sauce post-moderne (faut le voir pour le croire). Son Ghost Dog est un film de fin de siècle qui résonne comme un appel lointain, venu du Japon ancien, qui se mêle avec style au milieu urbain des USA. Ce mélange des genres a priori étrange n'est pas nouveau puisqu'il était une sorte de marque de fabrique du Wu Tang Clan dont le membre RZA compose la bande originale du film (coïncidence?). Le film s'amuse de son ambition à rassembler, à mélanger, au moyen de scènes drôles et attendrissantes où dialoguent trois langues différentes qui ne se comprennent pas tout en disant la même chose.


Un reflet loufoque qui cache des réalités plus graves que Jarmush refuse de traiter de manière frontale, préférant une voie plus imagée qui correspond mieux à sa façon de faire, plus efficace finalement. Un samouraï aux États Unis, à la société dite "libre" mais finalement pervertie et corrompu par quelques artefacts futiles, Jarmush oppose une tradition où le respect et les codes éthiques fondaient la cohésion de la société. Vision un peu simpliste mais qui, en refusant une diabolisation malvenue, se fait entendre et donne à penser.


Seulement Jarmush a les défauts de ses qualités, en ce sens qu'en voulant faire de son film un appel universel, il perd en concision et réveille les démons qui emporteront quelques années plus tard son intelligent Broken Flowers dans des déboires insipides. Nuisant à la substance première du film, Jarmush égare sa trame initialement épurée dans des épaisseurs inutiles et handicapantes. On a tout de même envie de le défendre, de retenir ce qu'il y a de bien dans ce Ghost Dog, son humanité et ses élans artistiques, même si on regrette certains écarts naïfs et un scénario quelque peu additif.

3.5étoiles

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9 décembre 2011 5 09 /12 /décembre /2011 14:16

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Le plus triste avec Shame, c'est qu'il va sans doute bénéficier malgré lui, du moins en France, de la médiatisation outrancière de l'affaire DSK. Pourtant, avec la seconde collaboration entre Steve Mc Queen (II) et Michael Fassbender, après le très bon Hunger, on est bien loin du misérable feuilleton journalistique plus pervers que son sujet. Après le corps d’un martyr (Bobby Sands) qui refuse de se nourrir pour plaider sa cause, c’est le corps d’un hyper actif sexuel qui est mis à nu (littéralement).

La grande force du film est de laisser parler les images pour ce qu'elles ont à montrer et pas à dénoncer. Shame évite tout écueil moral, et préfère au jugement sentencieux la simple constatation que tout un chacun n’est que le produit d’un monde qui n’a jamais été aussi malade, froid, sans vie (« we are not bad people, we just come from a bad place »). Brandon, interprété par un Michael Fassbender absolument époustouflant, est un abonné des coups d’un soir et du plaisir solitaire. C’est au contact de sa sœur, d’un rapport des plus humains qui soit même dans ses échecs, que Brandon face au miroir se verra, sans pouvoir rien y changer, tel qu’il est, tel qu’on on ne l’acceptera jamais, incapable d’être. Les turpitudes de son for intérieur et la lividité clinique de son appartement haut standing, résonnent comme le constat dramatique d’une société désenchantée, rationaliste où la figure déshumanisée de Brandon s’imposerait en paradigme.

En deux films seulement, Steve Mc Queen, dont on commence à discerner les composantes stylistiques, évolue vers un cinéma qui gagne en puissance visuelle ce qu'il perd en radicalité du propos. Sans tomber dans la complaisance d'un côté, ni dans la répulsion de l'autre, Shame trouve un équilibre dans le point de vue qui permet paradoxalement de saisir tout le déséquilibre qui fait le quotidien de ces êtres en dépérissement tentant de satisfaire le besoin immédiat à défaut de perspectives de vie (une carrière de chanteuse, une relation amoureuse…).

Toute sa réussite réside dans son esthétique, du son et de l’image, qui toujours signifiante amène le film vers des sommets de mise en scène. Lors de l’ouverture ou encore lors de la scène du bar, McQueen semble s’ériger contre le Temps et même en jouer, comme pour rappeler ces dérives-là ne sont pas les suites d’une mauvaise passe, mais que les pathologies faites de non-dits s’incrustent comme les pires cicatrices.

4étoiles

 

Vu dans le cadre du Festival d'Automne

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2 décembre 2011 5 02 /12 /décembre /2011 15:04

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Ultime film de Bela Tarr -dernier sorti en salle mais aussi dernier tout court- on pouvait attendre du plus célèbre réalisateur hongrois (pas dur en même temps), une conclusion digne de ce nom pour une filmographie qui n'a cessé de parler, justement, de la Fin. Le synopsis est un peu étrange, il parle du cheval que Nietzsche a enlaçé en 1889, première étape d'une folie qui le suivra dans sa tombe dix ans plus tard. Le Cheval de Turin, c'est le quotidien d'un père et de sa fille qui survivent tant bien que mal dans la Hongrie profonde, où tout annonce la fin du monde.

A Torinói Ló s'ouvre magnifiquement et se conclue admirablement, le principal problème, c'est qu'entre les deux s'écoulent plus de deux heures. On ne dira pas qu'elle sont mauvaises, on comprend très bien l'intérêt de la monotonie dans la réflexion de Bela Tarr, mais il n'en reste pas moins qu'en voulant moins marquer l'oeil et l'esprit que les soumettre à une langueur crépusculaire, le réalisateur hongrois prend le risque de mettre trop de distance entre l'image et son évocation. C'est dommage de laisser le spectateur face à ces vides cinq fois répétés, car même si Tarr varie le point de vue des banalités qu'il filme, il ne parvient guère qu'à ne changer la position de sa caméra, sans apporter de nouvelles perspectives autres que strictement visuelles.

Malgré tout, le film reste agréable à l'oeil et à l'oreille : la lancinante mélodie de Mihaly Vig, magnifique, est une nouvelle fois partie intégrante d'une idée de cinéma où le son compte autant que l'image, autant par sa présence que par son absence. Le film a quelques atouts, mais cette conclusion tarrienne (excusez l'adjectif) apparait comme un exercice trop personnel. Bien heureusement, à l'approche de la fin (du film, du monde, de la carrière de Tarr) le film devient plus essentiel, plus évident. En d'autres circonstances cette splendide conclusion aurait été une apothéose, ici, elle est parfaite pour elle même, pour ce qu'elle évoque indépendamment du film. Un silence, puis la nuit. Le crépuscule avant l'Aurore. Eternel recommencement. Qui a dit que la Fin devait être un grand fracas ? Qui a dit que la Fin était la Fin ? Surement pas Nietzsche.

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14 novembre 2011 1 14 /11 /novembre /2011 15:53

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Exaspérant. Dommage car l'ouverture était plutôt alléchante, fut-elle deux minutes perdues au milieu de 2h16 d'un film interminable (ou minable tout court d'ailleurs). L'ordre et la morale c 'est une sorte de non-cinéma d'autant plus détestable lorsqu'il ne se refuse aucune supercherie pour embarquer avec lui le spectateur en tentant vainement de cacher ses énormes failles derrière le principe bête et lâche du devoir de mémoire. La volonté explicative de Kassovitz se transforme en un dur labeur de démonstration factuelle agaçante car agencée comme mauvais épisode de 24H chrono (sauf que là ça dure 10 jours).

Lorsque le réalisateur, lors de la conférence, indique ne pas s'être inspiré du grand cinéma américain sur la Guerre du Vietnam (Coppola, Kubrick, Cimino, Stone etc.), on hésite entre rire d'une évidente mauvaise foi, et pleurer de les avoir vu sous nos yeux si pathétiquement martyrisées (scène de l’assaut ignoble, confusion entre un cinéma réaliste, et une caméra à l'épaule abjecte)

Montage résumé à d'hideuses coupures intransitives (et quand un plan dure 5 secondes maximum, ça finit par se voir), bande d'originale assommante ("gong" censés représenter l'avancée d'un tank)... A croire qu'après dix ans de négociations avec les kanaks, Mathieu Kassovitz ne pouvait pas s'en octroyer un de plus pour réaliser un film correct. Car si on ne remettra pas en cause l'honnêteté du réalisateur, on regrettera que toute son énergie ne fût déployée qu'autour du film et non plus dans le film, pour le film. Alors que dans La Haine il parvenait à combiner une richesse visuelle confondante avec une certaine idée du cinéma engagé, il arrive ici, en négligeant totalement la forme à gâcher tout intérêt citoyen que pouvait porter un tel sujet. L’ordre et la morale est peut-être édifiant, mais n’a rien d’un film de cinéma car à la conception d’un art visuel parlant d'abord par l'image, Kassovitz préfère l'ennuyeuse voie factuelle, discursive et scolaire.

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12 novembre 2011 6 12 /11 /novembre /2011 15:40

slider-contagion On commençait à s'en douter, des prémices l'indiquaient, mais ça y est on en a enfin le coeur net : le monde du cinéma est contaminé. Attention jusqu'ici des cas avaient déjà été repérés, en France notamment, où depuis longtemps une version mutée du virus sévissaient dans la comédie, la pauvre, condamnée à ne jamais retrouver les facultés mentales et physiques de ses jeunes années. Ailleurs sur la côte ouest américaine, le virus a aussi fait des siennes chez quelques malheureux ayant un système immunitaire des plus déplorables. Les intéressés semblent assez mal le vivre, en témoigne leur propension à détruire le monde dans chacun de leur film.


Mais là le phénomène semble s'être étendu géographiquement ainsi qu'adapté à quasiment toutes les formes de cinéma; à moins que ce soit que toutes les formes de cinéma qui n'en fasse plus qu'une, allez savoir... Les symptômes sont parfois difficiles à identifier (dans la bande d'annonce), et la plupart du temps on ne s'aperçoit de la maladie qu'en voyant le cinéma agoniser sous nos yeux. Il faudra redoubler de vigilance, car aussi évidente soit elle la maladie ne semble pas être identifiée par tout le monde, on peut donc conjecturer quant à une éventuelle contagion du public lui même, ce qui entraînerait un cercle vicieux inaltérable.

 

On ne remerciera jamais assez le docteur Soderbergh et son équipe qui ont réussi à isoler et cultiver le virus sur leur cobaye. Ceci va permettre de prendre des mesures, notamment d'établir une zone de quarantaine dans laquelle on commence déjà, 3 jours après l'identification du virus, à manquer de place. Très peu d'immunisés sont à décompter (Refn, Aronofsky, De la Iglesia...), il faudra sans doute attendre 2012 pour être fixé et éventuellement se rassurer sur certains cas (Nolan, Jackson...). En ce moment même, de courageux scientifiques cherchent un vaccin, en attendant rappelez vous que non, tout n'est pas bon dans le cochon.

1étoile

 

Vu dans le cadre du Festival d'Automne, croyez bien qu'autrement j'aurais pas perdu temps et argent.

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31 octobre 2011 1 31 /10 /octobre /2011 12:47

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Pour quelqu'un qui n'est pas fan absolu d'Hergé, l'adaptation de son Tintin avait quand même de quoi laisser dubitatif, et cela même s'il y a du bon monde aux manettes. La plus grande crainte concernait la motion-capture, qu'on pouvait interpréter comme une absence de choix entre le dessin animé 2D et  le film avec des acteurs en chair et en os. Ensuite adapter Tintin relève de la prouesse, car au delà d'une gamme de personnages variés, c'est tout un esprit Hergé dont il est question. Une finesse d'écriture traduisant aussi bien un amour de la variété culturelle du monde qu'une compréhension des enjeux internationaux qu'il s'amuse à entrevoir localement au gré des voyages de Tintin (URSS, Tibet, etc.). Bref, Hergé est un dessinateur géopolitiquement brillant, recommandé par les profs d'histoire et tout et tout.

 

Spielberg allait donc au devant de gros danger en adaptant Tintin, puisque au delà d'un défi graphique qui n'était pas gagné d'avance, il s'agissait pour le réalisateur de trouver l'équilibre entre le créatif et le respect de l’œuvre originale. Ce Tintin est donc une réussite sur tous les plans ou presque... Il balaie d'un revers les critiques qu'on élaborait d'avance sur la laideur des graphismes, mais là où il est le plus génial, n'en déplaisent aux puristes qui auraient crié de toutes manières au sacrilège sans chercher à comprendre, c'est dans ses choix d'adaptation. Quand j'entends crier au scandale, j'ai presque envie de rire devant ce déballage de mauvaise foi caractérisée car comment imaginer meilleure adaptation que celle que nous donne Spielberg ? Fidèle mais libre, librement fidèle, ou encore fidèlement libre, Spielby nous tourne un Tintin sauce Indiana Jones, la houpette en plus, le fouet en moins (peut être pour le prochain s'il y a Thcang, parce qu'on sait que quand Milou à le dos tourné, enfin bon...). Car si on peut jaser sur les choix scénaristique, sur les libertés qu'il s'accorde, prendre ses distances sera toujours le bon choix malgré qu'il suscitera toujours les reproches.

On y retrouve toute la subtilité des bandes dessinées, dans l'humour de second plan notamment, à laquelle Speilberg à su conjuguer un dynamisme increvable et réjouissant. La course poursuite dans Bagghar restera le moment marquant du film, excepté peut être la petite touche nostalgique d'hommage au dessinateur au tout début. La fluidité des enchainements tout comme leur vitesse, contributions indéniable du réalisateur, effaceront d'un trait les quelques facilités du scénario et les caractères des personnages, moins bien travaillés que l'univers dans son ensemble. Tant pis pour ce qui resteront à l’écart de ce Tintin et refuseront d'y voir toute la matière et l'élégance qu'il y a là.

Spielberg vantait Hergé pour sa manière de mettre du mouvement dans les cases d'une bande dessiné, aujourd'hui on peut vanter Spielberg d'avoir perpétuer cette science du mouvement, mais on ne le remerciera que trop peu pour y avoir ajouter de la vie et du cœur, pour avoir donné à Tintin l'adaptation cinématographique qu'il méritait.

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18 octobre 2011 2 18 /10 /octobre /2011 00:15

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Au delà du jeu de mot sur le virement de bord de l'ami Joey, on peut trouver à Polisse le genre de défaut pour lesquels on te dit que t'es un gros relou de rabat-joie. Le genre de défauts difficilement discernables mais qui donne ce ton un peu énervant au film. Alors pour nuancer de suite, tout le film n'est pas énervant, il est trop long, ce qui donne une impression de film en vague, de bons moments, des passages calmes (trop, et trop longs), et des scènes racoleuses qui sont là pour boucher. Disons le clairement, en 1h30 l'affaire était entendue, or, plutôt qu'un geste uni et précis, Maïwenn préfère s'éparpiller dans des dizaines de petites considérations inintéressantes, si bien sur la vie privée des protagonistes, que sur la variété trop exposée de leurs missions. C'est peut être ça finalement le défaut, ce manque de concision qui, en voulant parler de tout, ne stigmatiser personne, finit par casser le rythme et ne plus casser la baraque.

Puis le film à des idées étranges, difficilement qualifiables de bonnes ou mauvaises initiatives. Par exemple, le fait de ne voir aucune conclusion des affaires traitées, comme si plus que la fin, comptait davantage le chemin, l'action menée. C'est vrai que c'est peut être aussi le moyen de cacher éventuellement des réalités fâcheuses sur l'inefficacité du service, ou à l'inverse, tomber dans la divine providence, effet Abbé Pierre certifié. Quelques bons passages, surtout ceux qui sont drôles finalement, parce qu'ils sont ( ou du moins, font) vrais même quand ils sont crus. Pas étranger à cela, la prestation éblouissante de Joey Starr, le voir à un tel niveau me fait personnellement plaisir car c'est quelqu'un pour qui j'ai beaucoup d'admiration n'en déplaise à ma grand mère. Le Jaguar n'a pas laissé la place à Tigrou mais montre une vraie maturité, de l'acteur et de l'homme. Il occupe pleinement l'écran et fait contraste avec le reste du casting complètement fade à côté, inexistant. Joey lui, est bel et bien encore là (prêt à foutre le souk et tout le monde est cor-da...)

La relation qui s'établit dans le film, entre lui et sa femme à la ville (Maïwenn pour ceux qui sont à la masse), je ne sais pas si elle a quelque vérité autobiographique, mais est le parfait exemple d'une vérité absolue du film. Celui d'avoir voulu imprégner les différents acteurs de cette histoire. Les membres de la famille des acteurs ont l'air d'être réellement de la famille en général car il y a de la ressemblance de tous les côtés : famille de Maïwenn, fille de Karin Viard...  On sent que la jeune réalisatrice a voulu qu'ils se donnent eux, l'homme, la femme et non l'habituel acteur. Je pense que pour chacun Polisse a été un film spécial, une aventure humaine réelle. C'est pourquoi il faut garder ses réserves quand au faux réalisme parfois agaçant car surfait, qui apparaît ici comme un peu plus vrai, ou alors si j'ai tout faux, disons un peu plus élaboré, masqué.

 

Alors si Polisse a certainement été une expérience pour ses acteurs et sa réalisatrice, il est dommage qu'il le soit moins pour le public, car sous ses airs de cinéma engagé, Polisse est un  film choc qui ne choque pas. Polisse est trop lisse et policé, l'orthophoniste approuvera.

2.5étoiles

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